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Taille de l'homme
EAN13
9782889071654
Éditeur
Zoé
Date de publication
Collection
C. F. RAMUZ
Langue
français
Langue d'origine
français
Fiches UNIMARC
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Taille de l'homme

Zoé

C. F. Ramuz

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9782889071654
    • Fichier EPUB, avec Marquage en filigrane
    5.49

  • Aide EAN13 : 9782889071661
    • Fichier PDF, avec Marquage en filigrane
    5.49

Autre version disponible

Les années 1930 voient la montée du fascisme et du nazisme, le renforcement du
communisme et les balbutiements de la mondialisation. En parallèle, la société
paysanne, soudée à la nature, et avec elle le monde ancestral tel que Ramuz
l’a décrit dans Aline, sont en passe de changer profondément. Taille de
l’homme est l’occasion pour Ramuz de faire le point sur ces mouvements qui
bouleversent la condition humaine : « Le drame véritable est que l’homme n’a
plus de taille, étant sans commune mesure avec l’univers matériel, et, sur le
plan de la conscience, sans rapports avec un monde où il ne la retrouve nulle
part. De par ses dimensions extérieures et intérieures, rien n’égale la
solitude qui est la sienne, au milieu de tout ce qui l’entoure, de tout ce
qu’il pense, de tout ce qu’il sent. […] Qui sommes-nous encore dans notre
taille, nous autres hommes ? Quelle est encore notre mesure, alors que
l’univers est chaque jour et en tout sens plus minutieusement mesuré ? » Pour
dresser le bilan, Ramuz passe en revue différentes formes d’organisations
sociales : christianisme et paganisme, bourgeoisie, soviétisme, matérialisme,
autant de concepts que Ramuz déconstruit avec la clarté d’esprit et l’élégance
littéraire qu’on lui connaît pour redonner à l’humanité une échelle
appropriée. Face au monde moderne, Ramuz ne prône pas pour autant un retour en
arrière, il s’intéresse aussi aux découvertes et aux évolutions techniques.
Cependant, il met en garde contre la passivité qui découle d’un progrès trop
extrême, contre la machine qui impose un intermédiaire systématique entre
l’homme et la nature. D’une rigueur philosophique, Ramuz se fait par moment
lyrique pour évoquer les mythes ancestraux enracinés dans l’environnement,
d’où ont surgi les divinités païennes. Avec une verve rousseauiste, il
rappelle l’importance de la nature et du monde rural – l’homme véritable,
c’est le paysan, qui vit à taille humaine. L’État moderne « L’homme n’a plus à
se demander quelle est sa taille, car il n’y a plus aucune réponse possible à
sa question ; il a à se demander quel est son rôle, son rôle dans la société.
L’Etat, qui est la société, ou la société, qui est l’Etat, car les deux choses
n’en font plus qu’une, est seul à avoir une existence ; l’individu n’est qu’un
de ses organes : peut-être même serait-il plus juste de dire un de ses
rouages, cette forme de l’Etat étant bien, semble-t-il, plus mécanique
qu’organique. L’Etat ne considère dans l’individu que son utilité, son
rendement quotidien. » La bourgeoisie « Le tragique de la condition bourgeoise
est qu’elle reste attachée à certains avantages, qu’elle a mérités une fois
peut-être, mais qu’elle ne mérite plus. Les bourgeois sont donc obligés
aujourd’hui de se prouver à nouveau, par un sursaut d’activité, qu’ils ne sont
pas indignes de leurs privilèges : d’où le fascisme. Ils peuvent, en effet, au
fond de leur peur même, trouver un regain d’énergie, qui sera de nature à les
tromper un instant sur leur sort. Mais ils ne peuvent pas empêcher que la
doctrine qui est la leur, ou qui du moins a été la leur, étant révolutionnaire
à l’origine, n’aboutisse à une nouvelle révolution, qui s’inspirera d’eux tout
en se faisant contre eux. » Le communisme « L’idéologie communiste prend bien
soin de vous persuader qu’il n’y a rien. C’est une Eglise, c’est une parodie
d’Eglise. Elle seule connaît, décide et enseigne. […] Le communisme s’aime
lui-même et puis c’est tout : il prétend donc qu’on n’aime que lui. Ce qu’on
propose à l’homme c’est l’adoration d’une idéologie ; c’est même la seule
chose qu’il lui soit permis d’adorer. » Le matérialisme « L’homme, quel qu’il
soit, a les mêmes fonctions, donc les mêmes besoins matériels, les seuls qui
comptent ; et c’est, en gros, de vivre, au sens matériel du mot, c’est-à-dire
qu’il a besoin avant tout d’une certaine quantité de nourriture ou, plus
scientifiquement encore, d’un certain nombre de calories. […] Le matérialisme
fonde ainsi la société sur un type d’homme tout abstrait, l’homme standard, un
homme dont on n’a retenu et qui ne représente qu’une valeur quantitative, sur
quoi on fonde sa ressemblance : un homme tout à fait en somme antinaturel. »
La technologie « « Il ne serait peut-être pas non plus très difficile de
montrer que plus l’homme progresse dans la conquête de ce qu’il faut bien
appeler ses pouvoirs seconds, qui sont d’espèce mécanique, plus il recule dans
la possession de ses pouvoirs premiers, qui sont d’espèce intuitive et qu’il
va sans cesse déperdant. […] la machine est admirablement faite pour flatter
l’orgueil de l’homme, car elle lui dit : « Bientôt tu ne travailleras plus de
tes mains. » Mais en même temps elle lui dit : « N’oublie pas que c’est toi
qui m’as faite », et l’orgueil de l’homme croit que c’est vrai et l’orgueil de
l’homme voit encore qu’il va la perfectionner (la machine). Où s’arrêtera ce
perfectionnement ? se dit-il. Grâce à elle (la machine) qui vient de moi, et
sinon telle qu’elle est, du moins telle qu’elle sera bientôt, je vais
supprimer la nature, et, là où elle est hors de mon atteinte, je la
supprimerai par d’autres moyens, – en la comprenant. […] Jamais l’homme n’a
été plus en butte à l’universel qu’aujourd’hui, même quand il se tient bien
tranquille dans son coin ; aujourd’hui, l’univers vient l’y chercher. Le monde
autour de lui est dans un déplacement continuel, de plus en plus rapide, de
sorte que le monde est comme sans cesse présent tout entier dans un de ses
points. L’auto, l’avion, la T. S. F., le cinéma ; les images, les bruits, les
voix. L’homme n’a plus à faire, il n’a qu’à se laisser faire. La réalité qui
l’assaille surpasse de beaucoup en richesse ses plus folles imaginations.
Mais, en même temps, il se sent devenir petit, et de plus en plus petit, à
cause de sa passivité même. Il devient de plus en plus passif ; la réalité de
plus en plus active. » La nature belle et sacrée « Le paysan grec, quand il
levait la tête vers les montagnes, apercevait Vénus dans les vapeurs roses du
matin, pas beaucoup plus grande qu’une femme d’homme. L’orage survenait :
c’étaitJupiter qui agitait ses foudres, parfaitement visible à l’horizon.
Vulcain forgeait ses armes, Junonfronçait le sourcil. Rien, chez les dieux,
que l’homme ne pût connaître immédiatement, n’étant que prolongé par eux, car
leurs actions étaient des actions d’hommes, et leurs passions étaient des
passions d’hommes, et ils étaient liés entre eux par des liens de parenté, au-
dessus des hommes liés entre eux par des liens de parenté : – pères et fils,
de part et d’autre, mères etfilles, maris et femmes, jaloux, amoureux,
envieux, haineux. Quelrepos pour l’esprit de les considérer tout autour de soi
dans le bel ordre de leur dynastie, comme on peut le faire aujourd’hui encore
dans nos montagnes, car les dieux sont nés des montagnes et c’est dans les
montagnes qu’ils se sontréfugiés. On les y salue encore au passage, de temps à
autre, s’étonnant de les y retrouver, et non pas allongés dans des textes, ni
ensevelis dans des livres, mais tout debout encore et tout vivants, offerts
aux yeux. Je me rappelle ce beau matin d’été où nous roulions vers les portes
du Valais, longeant le Rhône. Comment faire sentir l’extraordinaire mélange de
repos, de fraîcheur, de silence et de pureté qui composait l’atmosphère de ces
lieux ? Comment dire les vertus de l’air, et qu’il faisait limpide et qu’il
faisait clair et qu’il faisait sombre ? Ah ! comme il faisait rose et bleu,
tandis que nous passions de la lumière à l’ombre, et que larosée sur les
feuilles était comme un peu de farine blanche. Iln’y avait personne, tout
était dans le repos. Deux chaînes rapprochées, l’une à votre droite, l’autre à
votre gauche, montent à près de 3000 mètres d’un seul élan, magnifiquement
taillées, et comme de manière à présenter toutes les variétés et toutes les
possibilités de la taille sur leurs fortes et larges assises, assombries dans
le bas par les forêts. Et, là-dessus, du rose, du jaune, de l’or, de l’argent.
On voyait ces rochers, on lesvoyait plus, mais on en voyait d’autres.
C’étaient des pyramides, c’étaient des colonnes, vues, disparues, reparues ;
c’étaient d’immenses piliers ou de larges f...
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